Paralysie (métaphorique)

Parfois je me fâche contre le mouvement sans déchet. En réalité les jolies blogueuses avec leur poubelle domestique qui tient dans un petit pot Mason m’impressionnent autant qu’elles m’énervent, et elle m’énervent souvent parce que je n’ai pas à ma portée leurs solutions (bref c’est de l’envie!). C’est pas demain l’avant-veille de l’ouverture d’une épicerie zéro déchets par ici! (On en est encore trop souvent aux poivrons enveloppés individuellement dans la pellicule plastique, ce qui me sidère.)

Diminuer notre production de déchets (la mienne) est nécessaire, louable et urgent. On ne peut même plus faire semblant de penser qu’on recycle vraiment: si on gratte la surface, on constate qu’au lieu de former un beau cycle arrondi, notre consommation de plastique n’est qu’un long trajet lent et horizontal vers la décharge. Donc chaque objet qu’on ne peut pas manger, composter chez soi, brûler ou transformer devient… un déchet. Même dans mon bac bleu! Moins de déchets, moins d’anxiété pour moi, moins de responsabilité, moins de soucis. Mais pour y arriver… faudra dépasser une certaine paralysie.

Dans certains cas, il faudrait consommer, faire un achat, pour remplacer et éviter le plastique, ce qui me rebute un peu. Mais le principal problème, c’est que pour arriver à avoir moins (de bébelles, cossins, trucmuches et bidules), il faudra que… je jette. Beaucoup. Or je voudrais pouvoir tout donner, et franchement c’est illusoire – il y a déjà trop d’objets sur cette planète, personne ne veut vraiment de mes vieilleries. (Je donne tout ce qui est encore donnable, mais il en reste beaucoup quand même.) Donc pour jeter moins il faudrait que je jette, d’abord, énormément.

Faire le tri… des projets à demi-réalisés, devenus maintenant des boulets symboliques de potentiel inachevé, des choses qui pourraient un jour s’avérer utiles (c’est pas si facile: loin des magasins, vaut peut-être mieux garder tous les gadgets de plomberie, etc.), des choses dont on veut se débarasser, mais seulement après avoir fait x alors que x exige un temps qu’on ne trouve pas… (un ordinausore, d’accord, mais vérifions d’abord son disque dur… et on en a plusieurs comme ça!)

Je n’ai aucune intention de pratiquer le Konmari (elle est folle, elle: ne garder que 30 livres?!?! Internez-la! En tout cas si je ne garde que 30 livres un jour, tuez-moi et vite, car j’ai été possédée par une entité maléfique, c’est clair!). La joie comme facteur de décision, je trouve ça un peu… con. Je pense, par contre, à l’idée suédoise du ménage en pensant à la mort à venir. Bon, je n’ai pas l’intention de trépasser de sitôt, mais on ne sait jamais. Et quand je pense à mes demi-projets dans les mains de quelqu’un d’autre, qui devrait forcément décider quoi en faire (ma fille veut déjà tout garder, ce serait terrible!)… ouf. Ça m’aide à lâcher prise.

Je voudrais juste avoir chaque chose à sa place et savoir ce qu’on a… en y ayant accès. En espérant que le travail à abattre sera assez long et ardu pour que je retienne la leçon et que je ne commence pas à raccumuler (le prochain chalet à se faire vendre et vider ne sera pas vidé chez moi sans discernement, j’en fais le serment! Non mais! Deux et demi, ça suffit!).

Côté plastique, c’est loin d’être gagné. Ici, avec les enfants, le plastique [sous forme de jouets] est omniprésent, mais ça va finir par se placer avec les années. Mais en général, je ne crois pas que le message passe aussi bien qu’il le faudrait.

Quand on parle de ne plus produire de plastique à usage unique, bien des gens réagissent en… faisant des réserves de pailles colorées (entre autres, j’imagine). On leur dit qu’il n’y en aura plus; ils y tiennent, ils en achètent plein, et ils en auront à vie. Le message essentiel, ils ne l’ont pas intégré, il n’est pas passé (c’est la même chose pour l’alimentation: vous ditez végé et certains vont aller se servir un deuxième steak… et c’est grave, parce que c’est entre autres parfois une réaction automatique du genre heille là vous autres en ville, vous nous direz pas quoi faire, qui s’ancre et mène à la ruine collective [une réaction au mépris qu’a et que démontre la ville pour la campagne, je le vois bien: beau cercle vicieux…]). Je sors peu à peu le plastique de ma cuisine (je vois déjà que le faire complètement sera impossible, mais je fais un effort). Devinez un peu si j’en reçois en cadeau…

Bref j’avance. Mais lentement. Deux pas en arrière pour trois en avant, quand ça va bien.

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3 réponses à Paralysie (métaphorique)

  1. Chantal dit :

    C,est drôle, j’en suis à peu près au même point de réflexion sur l’état de la maison et de la planète. Trier, sortir, garder, choisir. Sauf que moi, elle me parle, la Kondo. Pas tout, hein! 30 livres, je suis d’accord, c’est de la folie. Sauf que je viens de terminer sa série sur Netflix (j’adore la musique de la langue japonaise en tricotant) et sa façon de choisir ce qui « sparks joy », pour certain objets, et ce que tu veux emmener dans ta vie future avec toi pour d’autre, ça me parle. Et oui, je comprends complètement son bonheur de plier les vêtements! J’ai toujours aimé contempler une pile de vêtements bien pliés, ça me donne l’impression de mettre un peu d’ordre et de beauté dans le monde.
    Pour le pastique qui se retrouve dans les poubelles, je pense qu’il faut respirer. « Le mieux est l’ennemi du bien. » La paralysie (et l’anxiété) arrive quand on essaie de faire parfait. Moi, j’utilise les choses de plastique jusqu’à ce qu’elles soient hors d’usage, je les remercie pour leur service (Konmari here) et je les remplace par du mieux. Pas de remplacement systématique, pas de panique pour ce qui se retrouve aux poubelles.
    Enfin, c’est ce vers quoi je tends, parce qu’on sait toute les deux que la bataille quotidienne est loin d’être gagnée…

    • Campagnarde dit :

      Évidemment je n’ai jamais écouté la dame, hein, je n’ai que lu à son sujet. Mais si je devais conserver uniquement les vêtements, mettons, qui me produrent une étincelle joyeuse, je serais nudiste, et par moins vingt… ça devient vite dangereux!

      La pile de linge, pour moi, est un processus inachevé: la satisfaction viendra quand je ne verrai plus la pile, et idéalement tout sera caché dans un tiroir/placard et que je serai passée à autre chose. Je peux plier six brassées sans me plaindre, je trouve ça neutre – ni joie ni beauté ni rien (je m’intéresse bien plus à la disposition de mes livres sur leurs tablettes, ha!). Tiens, j’en ai 2-3 à plier, d’ailleurs. Avec mon entorse c’est devenu clair: si je meurs, mes amours vont finir ensevelis dans le[ur] bordel. En moins d’un mois. Déjà en deux semaines on voyait les strates historiques s’accumuler sur le plancher… (Je me dis donc qu’il vaudrait mieux que j’élague – pour leur sécurité!)

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